sandrine mariette

~ Factory

L’Homme de cinq heures

Quand sonnent 5 heures, il se passe quelque chose chez les artistes. Gilles Heuré nous promène, avec Paul Valéry, dans secrets de la création. Ce livre est une parenthèse enchantée, truffée d’anecdotes sur la littérature… Cinq heures, Paul Béhaine quitte son emploi à la Bibliothèque Nationale, lorsqu’un curieux personnage l’aborde et prétend être Paul Valéry. Revenant ou farfelu ? Il s’enfuit, en lui laissant un rendez-vous, le lendemain, à 5 heures du soir précises. Paul Béhaine se dit que la ressemblance ne fait aucun doute ; mèche et moustache, silhouette osseuse sont identiques à celles du poète, penseur et académicien, mort en 1945. Au fil des entrevues, Paul Valéry, dit Monsieur V tient à initier Paul Behaine à la confrérie des « cinq-heuristes ». Pourquoi toujours la même heure ? Parce que « tous les tableaux […] ont à voir avec les 5 heures. Qu’il s’agisse de leur exécution, de leur thème, de l’état d’esprit qui les a inspirés, des sentiments intimes, des sensations comprises ou ignorées… », l’heure d’or qui fourmille aux coins des pages de Stendhal, Maupassant, Marina Tsetaeva, Melville… Le lecteur se régale, surtout, lorsque que Monsieur V, aux obsessions courtoises et à la logorrhée drolatique tient à remettre la marquise à l’heure. Il n’a jamais tenu ce propos : « La marquise sortit à heures », comme le cite Breton dans son « Manifeste du surréalisme ». Pour Paul Valery, cette phrase symbolisait un mauvais début de roman, le mépris de l’art romanesque, mais pas une histoire d’horloge. C’est là où se joue toute la mécanique romanesque imaginée par Gilles Heuré, dont la plume châtiée et le style épuré, tranche : l’imaginaire est bien réel. Un moment précieux aux côtés d’artistes devenus familiers, une approche anglo-saxonne de l’amour des arts, affranchie mais érudite ; une fiction extravagante à laquelle peu aurait osé se risquer.

Sandrine mariette

« L’Homme de cinq heures », de Gilles Heuré (Viviane H amy, 279 p.).

Posted in Littérature générale by Sandrine Mariette on janvier 30th, 2010 at 10:32.

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